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Rivière-du-Loup, le 28 mars 2022
PAR COURRIEL
Monsieur Christian Dubé
Ministre de la Santé et des Services sociaux
Ministère de la Santé et des Services sociaux
Édifice Catherine-De Longpré
1075, chemin Sainte-Foy
15e étage
ministre@msss.gouv.qc.ca
Monsieur le ministre,
Depuis maintenant plusieurs mois, les travailleurs du réseau préhospitalier (paramédics, répartiteurs médicaux d’urgence, préposés au traitement des appels d’urgence et employés de soutien) ont apporté plus que leur contribution normale au réseau de la santé, et ce, sous plusieurs formes. Dès le début de la pandémie de covid-19 en 2020, ils ont été utilisés en première ligne pour sauver des vies avec des équipements de protection individuelle qui laissaient à désirer, mais ils l’ont fait quand même. Ils ont répondu à l’appel pour la population. Il aura fallu dénoncer et revendiquer des masques N95 et des équipements adéquats ainsi que des endroits appropriés pour désinfecter notre matériel. On nous a même demandé de laver nos masques…pour les réutiliser. Une fois contaminés, on nous place en isolement sans maintien de salaire à contrario des autres salariés du réseau de la santé et des services sociaux et de la fonction publique du Québec.
Le MSSS, via la direction médicale nationale des SPU, a sans cesse modifié les protocoles d’intervention et nos membres depuis deux ans et ils ont dû s’adapter d’une fois à l’autre et faire en sorte de ne pas se contaminer eux-mêmes avec les moyens du bord. On nous a envoyés en CHSLD sans les primes qui étaient appliquées dans ce grand réseau de la santé et même à des citoyens qui se sont fait embaucher via « Je contribue ». Nous avons été et sommes encore dans les zones dites rouges et cela, avec seulement la prime de base de 8%, que nous avons dû aussi aller quémander via les médias pour nous faire entendre de la part du MSSS. On nous utilise dans les cliniques de vaccination, dans les urgences des centres hospitaliers, etc. Toujours avec notre même salaire de paramédic, le plus bas salaire de tous les intervenants d’urgence au Québec.
Lors des premières mesures visant à soutenir les salariés du réseau de la santé avec la prime covid de 8%, tous les salariés du réseau, même dans les bureaux, ont reçu diverses primes et incitatifs en surplus à la prime de base. Puis arrive l’arrêté ministériel 2020-003, qui instaure de nouvelles primes et incitatifs pour les salles d’urgence, les primes de soins intensifs, les primes de CHSLD, le temps supplémentaire à temps double, la prime d’assiduité, les primes pour ceci et pour cela. Les salariés du réseau préhospitalier eux, oubliés, écartés, non prioritaires pour le MSSS !
En 2020, lors du début de la pandémie à l’occasion des diverses rencontres Zoom, les gens du MSSS nous demandaient de faire notre part pour aider leur réseau de la santé à passer au travers et nous assuraient que les paramédics faisaient partie intégrante du réseau de la santé. Mais à travers leurs agissements, jamais nous ne ressentons que c’est le cas. Nous constatons que nous en faisons partie uniquement lorsque le MSSS veut nous imposer des conditions et des obligations, en manipulant notre désir de vouloir sauver des vies et notre dévouement pour les patients que nous traitons. Cependant, lorsque vient le temps de nous écouter, de nous bonifier et de nous reconnaître à notre juste valeur, le MSSS est absent et méprisant à notre égard.
Pendant ce temps, nous continuons à répondre aux appels avec nos ambulances, en dehors des cas de covid-19, comme nous l’avons toujours fait pour la population québécoise. Nous le faisons malgré l’essoufflement de nos membres dans ce contexte de manque de main-d’œuvre, en temps supplémentaire, avec nos demandes de congés refusées, nos vacances annulées ou reportées, des horaires de faction à 168 heures de gardes rémunérées à 80 heures. Nous avons des horaires de travail qui comportent un délai de réponse avant de se mettre en route, est-ce acceptable pour sauver des vies alors que chaque minute compte? Pour le préhospitalier, le MSSS est devenu un maître du « cheap labour ».
De plus, le MSSS se cache derrière des entreprises privées pour gérer ce réseau parallèle et il leur lance la balle lorsque nous réclamons des bonifications en clamant haut et fort qu’il n’est pas notre employeur et que ceux-ci ont les ressources pour répondre à nos demandes. Mais de l’autre côté de la bouche, lorsqu’il a besoin de nous, il nous dit que nous faisons partie de son réseau de la santé parce qu’il le finance et nous demande que nos conventions collectives soient cohérentes avec les autres titres d’emploi de son réseau. Elles doivent être cohérentes pour les restrictions et les obligations, mais pas pour la rémunération et les bonifications. Sur nos talons de paie, il est inscrit le nom d’une entreprise privée, une coopérative ou un OBNL, pas le MSSS, pas le CISSS/CIUSSS ni un CH. Notre régime de retraite est le RRTAP, pas le REGOP. Donc non, nous ne faisons pas partie de ce réseau dans les faits.
Il nous apparaît que pour le MSSS, seuls les hôpitaux, les CLSC et les CHSLD font vraiment partie du réseau de la santé au Québec, pas les salariés du préhospitalier.
À la table de négociation, on nous offre 2% par année d’augmentation pour des deux années qui sont déjà presque derrière nous et celle qui s’en vient, soit 2023. Il nous propose les mêmes échelons salariaux qui sont dans notre convention collective échue et aucune nouvelle prime. Les réponses du MSSS et du Conseil du trésor à nos demandes sont « statu quo » ou « refusées ». Nous sommes toujours les derniers à passer à la table de négociation, après les médecins, les infirmières et tous les autres professionnels en soins. Nous vivons un mépris sans borne de la part des représentants du gouvernement à la table de négociation nationale. Nous sommes devant des mandataires sans réel mandat.
Le 16 avril prochain, les primes covid de 4% et de 8% seront abolies pour les travailleurs du préhospitalier, selon votre communiqué du 11 mars dernier intitulé « Modifications aux mesures incitatives pour le personnel du réseau de la santé et des services sociaux et des milieux privés ». Ce qui nous démontre encore une fois l’incompréhension du MSSS à l’égard des soins préhospitalier. Est-ce que les paramédics verront leurs protocoles adaptés à la covid-19 revenir à la normale ? Est-ce qu’ils ne seront plus tenus d’appliquer des mesures de préventions sanitaires en milieu de travail ? Auront-ils à ne plus revêtir de vêtements de protection individuelle lors de leurs interventions ? À l’annonce d’une sixième vague par le directeur de la santé publique, nous nous questionnons à savoir si réellement le réseau préhospitalier reviendra à son état avant mars 2020.
Devant toutes ces situations, le MSSS nous démontre, par ses actions ou inactions, c’est selon, que nous ne sommes qu’un maillon mineur à ses yeux.
C’est pourquoi, la FPHQ appelle à ses membres de cesser toute implication au niveau des ententes de prêts de services entre nos employeurs et les CISSS/CIUSSS. Nous reprendrons notre implication supplémentaire uniquement lorsque le MSSS et votre gouvernement nous démontreront, par leurs actions, que nous faisons partie intégrante du réseau de la santé, non plus sur des paroles vides.
Les primes, les salaires et toutes les conditions de travail du réseau doivent s’appliquer de façon intégrale aux salariés du préhospitalier, un point c’est tout !
Afin de pouvoir bien nous faire comprendre, nous sollicitons une rencontre avec vous dans les plus brefs délais. Il nous fera alors plaisir de répondre à vos questions et vous faire connaître plus en profondeur ce réseau que votre ministère finance de façon inéquitable par rapport au RSSS québécois.
Nous sommes donc disponibles à votre convenance pour vous rencontrer en personne.
Veuillez recevoir, Monsieur Dubé, nos plus cordiales salutations.
Pour les travailleurs et travailleuses désabusés du réseau préhospitalier, membres de la Fédération des employés du préhospitalier du Québec.
Daniel Chouinard
Président
FPHQ